Présidentielle : six associations d’élus au front pour les banlieues

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Par-delà les étiquettes politiques et les tailles diverses des collectivités qu’elles représentent, six associations nationales d’élus locaux ont publié, le 28 mars, une contribution commune adressée aux candidats à l’élection présidentielle. Leurs demandes, très précises, révèlent une aspiration à plus de confiance de la part de l’Etat et plus de souplesse des politiques publiques.

Les candidats à la présidentielle sont prévenus : les élus locaux n’attendront pas de voir à quelle sauce politique seront traités les quartiers et villes populaires. Dans un texte publié le 28 mars, ils demandent en effet dès maintenant aux prétendants à la présidence « un pacte de confiance durable entre l’Etat et nos collectivités ». Un document co-rédigé et signé par six associations d’élus : l’Association des maires de France (AMF) et celle d’Ile-de-France (Amif), celles des petites villes, Villes de France, France urbaine et Ville et Banlieue.

Même si cette dernière a déjà rendu publique une « harangue à la nation », ces six associations ont souhaité faire cette « adresse » commune aux candidats alors que la campagne électorale n’aborde souvent les banlieues « qu’au seul prisme de la sécurité et par l’annonce de postures plus que de véritables politique publiques », pointe Michel Bisson, président de Grand Paris Sud et de la commission politique de la ville et cohésion sociale de France urbaine. Elles estiment au contraire, explique-t-il, qu’une « partie de l’avenir de la France se joue dans ces territoires » à la population jeune, que ces quartiers ont des vulnérabilités mais aussi des ressources plus importantes que d’autres, et qu’il s’agit d’un « enjeu républicain ».

« Nous avons besoin d’un quinquennat stable, énonce Philippe Rio, maire de Grigny et vice-président de Ville et Banlieue. Pas comme le précédent, avec l’occasion manquée du plan Borloo puis un rattrapage en Conseil interministériel des villes (CIV), en janvier 2021, parce que nous avions lancé l’alerte. » Quelques jours auparavant la publication de cette contribution commune des associations, Jean-Louis Borloo lui-même avait publié un document aux allures de programme politique, dans lequel il assure que, pour les banlieues, « les 19 programmes du plan de 2018 ont été en partie suivis », mais qu’il « faut un effet « blast » beaucoup plus important ».

Adaptation aux besoins locaux

« L’adresse » des élus porte d’abord sur la méthode : « Stop aux appels à projets ou à manifestation d’intérêt, lance ainsi Michel Bisson. Tout cela ne peut pas faire des politiques de droit commun qui s’inscrivent dans la durée. Il ne peut y avoir de politique publique que concertée et s’inspirant de ce qui se fait sur le terrain ». Pour ces élus, l’adaptation aux besoins locaux passe par une réintroduction dans la géographie prioritaire de quartiers en voie de fragilisation ou encore par la gestion déléguée d’une partie des crédits nationaux de la politique de la ville (budget opérationnel 147) aux collectivités volontaires (en particulier en matière de réussite éducative et de prévention spécialisée).

Ils ont par ailleurs pris goût au suivi régulier par Jean Castex des mesures annoncées en CIV et estiment que, pour être « interministérielle et transversale », la politique de la ville doit en permanence dépendre directement du Premier ministre. Autre attente : l’agilité des politiques publiques, avec « une articulation souple et intelligente des contrats de ville aux Contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ». « Les candidats à la présidence de la République doivent avoir conscience que le temps du mandat sera aussi celui des contrats de ville », pointe Catherine Arenou, maire de Chanteloup-les-Vigne, vice-présidente de Ville et Banlieue et co-présidente de la commission politique de la ville de l’AMF.https://1a14c195457f3154983223deeec2d7dd.safeframe.googlesyndication.com/safeframe/1-0-38/html/container.html

Le texte liste ensuite, pour chacune des grandes thématiques de la politique de la ville, ce qui fonctionne, l’existant méritant d’être amélioré et leurs pistes pour « aller plus loin ». Ainsi, pour l’emploi et la formation, « il faut renforcer la coordination entre le service public de l’emploi et les autres acteurs, y compris ceux qui travaillent à lever les freins tels que l’accès au droit ou à un logement décent, à la santé… », cite Frédéric Leturque, président de la Communauté urbaine d’Arras et co-président de la commission politique de la ville et cohésion sociale de France urbaine.

Clarifier la place des collectivités

Pour la sécurité, il faut selon eux multiplier les Quartiers de reconquête républicaine, mais, précise Thierry Falconnet, maire de Chenôve et président de Ville et Banlieue, « en clarifiant les compétences et la place des collectivités dans les Contrats de sécurité intégrée et les rôles respectifs des police nationale et municipales ».  Et donner « plus de visibilité sur les moyens », par exemple pour les Bataillons de la prévention.

Sur le plan de l’éducation, Hélène Geoffroy, maire de Vaulx-en-Velin, vice-présidente de Ville et Banlieue et co-présidente de la commission politique de la ville de l’AMF, s’inquiète d’une possible remise en cause des financements des dispositifs Vacances apprenantes et Quartiers d’été pour l’été 2022, et demande leur reconduction. Les Cités éducatives montrent par ailleurs, ajoute-t-elle, que « les maires demandent à être partie prenante de la question éducative ». Elle réitère aussi une demande de Ville et Banlieue : que les coûts induits par la forte proportion d’enfants et de jeunes dans les communes populaires fasse l’objet d’une compensation financière pour les communes.

Logique de « reste à vivre »

Le document aborde également le sujet de la transition écologique qui, affirment les élus, est aussi un sujet social. Leurs demandes : « Qu’on parte d’une logique de « reste à vivre » et réoriente les aides Ma Prime Rénov vers les propriétaires occupants et copropriétés des quartiers fragiles », lance Romain Colas, maire de Boussy-Saint-Antoine et vice-président de l’APVF. L’Anru, elle, doit selon eux avoir davantage de moyens, ce en permanence et non au gré de programmes. En outre, « des politiques de peuplement doivent être systématiquement adossées aux projets de rénovation urbaine », assure l’élu. Enfin, affirme Patrice Leclerc, maire de Gennevilliers et vice-président de l’Amif, « des politiques publiques plus fortes sont nécessaires contre l’exclusion et les discriminations ». En ce sens, estime-t-il, « l’Etat doit mettre des moyens surtout sur la petite enfance ».

Sur toutes ces attentes, ils espèrent être entendus, non seulement des aspirants présidents de la République, mais de tous ceux qui se porteront candidats pour les élections législatives.

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